5 raisons pour lever le tabou autour de la sexualité des adolescents 

Par Nafissate Hounkpatin
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L’adolescence est une période de grands bouleversements (transformations biologiques, changements psychologiques ; sexualité naissante) pendant laquelle, l’individu cherche à créer ou à développer sa propre identité en explorant divers domaines. Selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), l’adolescent est toute personne dont l’âge est compris entre 10 et 19 ans tandis que le jeune doit avoir entre 15 et 24 ans. Le monde de la sexualité est l’une des principales problématiques liées à ce passage de l’enfance à l’âge adulte et pourtant, parler de sexualité des ados et jeunes n’est vraiment pas chose aisée dans nos contrées, que ce soit pour les parents, enseignants, médias, ainsi que pour ces jeunes eux-mêmes.

Pour ce fait, nous avons énuméré cinq raisons pour lesquelles la sexualité des jeunes doit être évoquée sans voile.

1- Pour le droit à la bonne information

La sexualité des jeunes est un sujet d’une importance capitale qui a trait à leur santé et à leur avenir. Pour le Fonds des Nations Unies pour la Population(UNFPA) / Dakar, l’une des contributions les plus décisives que puisse apporter un pays pour son progrès et sa stabilité économique, sociale et politique, est de répondre aux besoins de santé et de développement des adolescents. Il est donc important d’en parler car les adolescents ont de réels besoins en information sur la Santé Sexuelle et Reproductive (SSR).  Le manque d’informations peut créer de grands dommages au sein de cette couche de la population qui au fil du temps devient de plus en plus imposante de par son nombre : les moins de 15ans font 45% tandis que les ados de 10-24 ans font 32,8% de la population béninoise.

Pour d’autres, parler de la sexualité avec les ados ou jeunes c’est leur laisser une porte ouverte à la dépravation, mais mettre le voile autour du sujet attire plus la curiosité des ados et jeunes qui sont obligés de se tourner vers des sources d’informations pas trop catholiques (Internet, amis, magazine, images et films pornographiques). Ce qui peut parfois les pousser à commencer une activité sexuelle on ne peut plus précoce par manque de canalisation.

Selon l’Enquête Démographique et de Santé (EDS) 2011 Bénin, 13% et 12% respectivement des jeunes et adolescents ont commencé leur vie sexuelle avant l’âge de 15ans. De même que 46% des filles et 42% des garçons avant l’âge de 18ans; mieux si on remonte dans les écoles primaires lors de certaines investigations ou sensibilisations, on remarque que certains écoliers dans la tranche d’âge de 10 ans ou un peu moins ont déjà des comportements sexuels bien que n’y comprenant pas grand-chose.

Cet état de choses est vraiment préoccupant, les adolescents et jeunes comme toute autre personne ont droit à l’information pour leur bien-être. Comme le stipule l’article 17 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant « les Etats parties doivent assurer l’accès aux informations et matériels visant à promouvoir le bien-être social, spirituel, moral et la santé physique et mental de l’enfant ». Les autorités gouvernementales ont donc le devoir d’œuvrer pour rendre l’accès aux informations en matière de la Santé Sexuelle et Reproductive facile aux adolescents.

2- Pour prévenir les situations embarassantes

Concernant la santé sexuelle des jeunes, les chiffres sont tout aussi alarmants au Bénin que dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne.

La prévalence des IST chez les jeunes de 15-24 ans selon la DSME (Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant) est de 3,3% chez les filles et 7,5% chez les garçons. Bien que la prévalence du VIH soit plus ou moins stabilisée à 1,2 depuis 2006 parmi la population de 15-49 ans, il est à noter que la moitié des nouvelles infections surviennent chez les moins de 25 ans et en l’occurrence chez les garçons de 20-24 ans.

De même, les avortements clandestins constituent la première cause de décès maternel chez les adolescentes au Bénin et les complications liées aux grossesses et accouchements chez les ados en sont la deuxième. Par ailleurs l’OMS estime que 16 millions de jeunes filles âgées de 15-19ans contres un million de jeunes filles de 10-14ans accouchent chaque année. Au Bénin, l’EDS 2011 a révélé que 42% des jeunes de moins de 25ans contre 26% des adolescentes de 15-19ans et 06% des adolescentes de moins de 15ans ont déjà procréé. Cette dernière situation a un impact négatif sur la santé et la survie des enfants et des adolescentes et est d’autant plus préoccupante que les programmes de Santé de la Reproduction pour les adolescents et jeunes sont très peu développés dans notre pays. Cet état de choses ne tient pas compte des trois aspects que couvre le concept de santé des adolescents : une bonne condition physique, le bien-être et l’absence de maladie.

3- Pour éviter les comportements à risques

Les adolescents qui commencent une vie sexuelle assez tôt sont souvent sujets aux comportements à risques comme l’usage du tabac, de la drogue, de l’alcool, le multi-partenariat sexuel, l’exposition aux MST/VIH SIDA et grossesses précoces, la violence et le manque d’ardeur à l’école ou à l’apprentissage. Bien que ces comportements soient nuisibles pour eux-mêmes et leur entourage, selon la DSME 17% des ados entre 11 et 15ans fument toutes les semaines. Certains continueront ces comportements jusqu’à l’âge adulte par addiction. Selon Carine Maillard, ces comportements immatures sont liés au développement cérébral : « Les régions du cerveau impliquées étant immatures, les jeunes éprouvent plus de mal à les contrôler. C’est quand ils comprennent qu’ils ne tirent pas un bénéfice suffisant par rapport au risque encouru qu’ils adaptent leur comportement pour la prochaine expérience du même type ». Mais parfois les dégâts sont déjà faits et il est trop tard pour les réparer.

4- Pour leur éducation

Les ados et jeunes ont incontestablement besoin d’informations sur leur sexualité mais au-delà de tout, ils ont besoin d’une éducation sexuelle de base pour grandir en bonne santé et devenir des adultes responsables, car il est démontré que l’information à elle seule n’est pas suffisante pour modifier leurs comportements. Les parents ont donc le devoir d’engager des discussions sur la sexualité avec leurs enfants, déjà à la période préadolescente. De même, l’école étant le second acteur de l’éducation des enfants, des programmes éducatifs sur la sexualité doivent être intégré dans les situations d’apprentissages pour prévenir les comportements à risques. Enfin, les médias (magazines, télé, cinéma, publicités etc..) aussi doivent jouer leur rôle en faisant attention aux images qu’ils renvoient aux jeunes, images qui font parfois la promotion des comportements à risques comme un signe d’aisance ou d’émancipation. On n’est pas sans savoir qu’une activité sexuelle précoce est un mauvais présage pour la santé sexuelle et reproductive à l’âge adulte, alors qu’un jeune bien éduqué débutera sa sexualité avec une maturité et une responsabilité qui lui permettra d’assurer la prévention des MST et sa contraception.

5- Pour leur protection

Enfin, parler de la sexualité des adolescents et jeunes, c’est ouvrir un horizon sur la perspective de mettre en place une politique environnementale, sociale et sanitaire propice pour l’amélioration de la santé sexuelle et reproductive des adolescents et jeunes, afin de leur garantir un bel avenir. Entre autres, ça peut pousser les dirigeants à réfléchir dans le sens de la création d’espaces de divertissements sains pour jeunes ; de l’intensification des campagnes de sensibilisation et d’informations sur la Santé Sexuelle et Reproductive des Jeunes. En outre, pour les jeunes déjà en activité sexuelle, il est important de leur rendre l’accès aux méthodes contraceptives libre et gratuit, et leur améliorer l’accès aux soins de santé reproductive de qualité.

L’adolescence est une étape importante de l’existence au cours de laquelle les jeunes posent les bases de leur vie d’adulte, d’une vie saine ou pas.

Il est donc évident qu’on doive briser le silence autour de la sexualité pour avoir de meilleurs citoyens de demain et pour le développement de nos nations.

Le blog de Arayaa, tout ce que votre médecin n’a pas le temps de vous expliquer en consultation![:]

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5 commentaires

DJIVOH janvier 9, 2018 - 2:10

Bonjour J’ai lu avec intérêt l’article sur l’information à la sexualité chez les adolescents. Je vous remercie pour cet article qui j’espère va permettre de lever le tabou sur la question de la sexualité dans notre pays. Mais je suis restée sur ma fin dans l’ensemble. Ma question est de savoir: que doit-on dire effectivement aux enfants et comment doit-on le leur dire? Quelles informations pour quel âge? Merci à vous. Yollande DJIVOH SONOUNAMETO Kinésithérapeute

Nafi janvier 10, 2018 - 9:37

Bonsoir Mme DJIVOH,merci pour l’intérêt que vous portez à cet article et pour vos questions qui sont très pertinentes. Nous n’estimons pas qu’il y a une liste exhaustive d’information à apporter aux enfants suivant l’age, mais l’éducation à la sexualité commence dès qu’on ressent le besoin chez l’enfant, déjà quand il commence à poser des questions en rapport avec la sexualité ou quand il est confronté aux scènes ayant rapport à ce sujet à la télévision;sur le net ou dans la vie réelle.
Exemple:lorsque nos mamans suivent les télénovelas avec des enfants 05-10 ans et qu’un couple s’embrasse voir plus,ce n’est pas la peine de zapper la chaîne ou de renvoyer l’enfant du lieu,ça ne fera qu’attirer son attention.Il faut peut être discuter avec lui à la fin pour voir à peu près sa compréhension de cette scène.Il s’agit donc d’apporter des information simple et vrai à l’enfant selon son degré de compréhension,instaurer en quelque sorte le dialogue parent-enfant sur la sexualité pour que l’enfant perçoit en vous une personne ressource à qui il peut se confier.Aussi déjà à la période pré-puberté il faut déjà expliquer à l’enfant les modifications qu’il observera sur son corps et au niveau de son organisme,et surtout commencer par apprendre aux filles la gestion de la menstruation et l’importance de la bonne hygiène.

DJIVOH janvier 11, 2018 - 1:24

Merci à vous. Votre réponse m’éclaire un peu mieux. Je ne suis pas une fan de la télévision et encore moins des séries novélas, donc je n’ai pas l’occasion de démarrer le dialogue à travers ce genre de messages passés à la télévision. Pour des parents qui se retrouvent dans la même situation que moi, doit-on indépendamment de toute situation aborder la discussion? surtout si l’enfant n’a posé aucune question? Autrement, peut-on choisir délibérement d’en parler sans se rapporter à un fait? Et si oui quelle précaution faut-il prendre pour ne pas faire pire que bien? Enfin s’il y a moyen de faire pire que bien, par exemple attiser la curiosité de l’enfant sur quelque chose qu’il ne soupçonnait pas forcément au départ.

Nafi janvier 16, 2018 - 1:47

Je propose de te répondre à travers un nouvel article. Je ferai très vite, promis!

DJIVOH janvier 16, 2018 - 2:16

Super. Merci à vous.

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